Opus 5 : Effets radiologiques et toxicologiques

Publié le

Comment se fait-il, que le groupe de travail du SMP « Recommandations de bonne pratique  Surveillance médico-professionnelle de l’exposition interne aux radionucléides en Installations Nucléaires de Base.  Juillet 2011 » ne s’étend pas sur le cas de l’uranium appauvri, U238, en omettant de définir sa borne d’identification isotopique.

 

A quoi est dû cette singularité, est-ce un simple positionnement par défaut qui estime qu’il n’y aucun risque d’uranium appauvri dans les installations nucléaires de base, ce qui est difficilement concevable, vu la participation au sein du groupe de travail d’un certain nombre de personnes provenant d’AREVA, (spécialisé dans les filières en amont et en aval de la production d’énergie nucléaire), à moins que ce thème ne soit en réalité un sujet sensible  qu’il faut éviter d’aborder.

 

Il est alors bon de se poser la question. Mais pourquoi l’uranium appauvri alors qu’il a un très faible taux d’émission alpha, donc très peu irradiant dans le cas de contamination interne, en comparaison des autres radionucléides présents en Installation nucléaire de base, n’est pas exploité en termes de communication pour relativiser l’impact radiologique de l’uranium.

Bien au contraire, c’est un sujet qui est complètement occulté, dans le « SMP », ce point est pour le moins troublant.

Lorsque l’on prend le temps de regarder en détail ce que ce sujet induit, on se rend compte que c’est la porte ouverte à la compréhension de tout un processus, complexifié à souhait, pour le rendre incompréhensible de tous. Les médecins eux mêmes en ignorent, la véritable substance.

Des questions sur ce sujet ont été posées à plusieurs d’entre eux, aucun n’a pu répondre aux interrogations soulevées, non pas, par mauvaise foi, mais simplement à cause de l’angle d’approche de la question qui les placent dans une incapacité à pouvoir répondre.

De toute évidence il apparaît chez les médecins, une méconnaissance d’éléments techniques, soigneusement dissimulés, qui limitent leurs jugements. Tout est fait pour que ces données techniques n’entrent pas dans leur champ de compétence, ce caractère technique discret, est tout particulièrement entretenu, bien souvent à leur insu, afin d’éviter une curiosité indésirable et pour le moins compromettante.

 

Ce n’est pas un hasard s’il existe un cloisonnement aussi marqué entre le Laboratoire de radiotoxicologie d’EDF (le LAM), et les médecins.

Ce n’est pas un hasard si la chargée d’Etat-Major du Service de Santé d’EDF, sert d’interface entre le laboratoire et les médecins.

Les activités du laboratoire, sont bien évidemment complémentaires à celles des médecins, cependant, elles opposent deux approches différentes, les médecins ont une approche biologique des questions, le laboratoire en a une approche de mesures physiques.

La corrélation des deux approches, relève de l’exclusivité du Directeur médical du LAM, sous la coupe de la chargée d’Etat-Major du service de santé d’EDF. Cette corrélation est littéralement dogmatisée, par des abus de langage par défaut très orientés. Les médecins ne savent pas précisément ce que mesurent les techniciens, ils ne font que prendre les résultats qui leurs sont fournis et ne font que les interpréter comme il leur est demandé de le faire. D’ailleurs comme le LAM se propose d’effectuer le calcul de dose, ils n’ont plus qu’à prendre le résultat final sans se poser plus de questions.

 

Pour comprendre comment ce très étrange mode de fonctionnement est devenu possible, il est important de préciser un certain nombre de points, que beaucoup ignorent.

 

Le mot radiotoxicologie est composé de deux termes :

 

Radio, pour le caractère radiologique, c'est-à-dire le détriment causé aux cellules exposées par une irradiation interne qui se caractérise par une radiolyse.

La radiolyse de l'eau est la dissociation par décomposition chimique de l'eau (H2O) (liquide ou de vapeur d'eau) en hydrogène et hydroxyle, respectivement sous forme de radicaux H· et OH·, sous l'effet d'un rayonnement énergétique intense, celle-ci se traduit au niveau cellulaire par la rupture des brins d’ADN.

 

Toxicologique, pour le caractère toxique des particules incorporées dans l’organisme.

La toxicité est la mesure de la capacité d’une substance (ex. : produit chimique, radionucléide, molécule organique) à provoquer des effets néfastes et mauvais pour la santé ou la survie chez toute forme de vie qu’il s'agisse de la vitalité de l'entité ou d'une de ses parties (ex. : foie, rein, poumon, cœur).

 

 

Il est très important de préciser les choses.

Dans le cas d’une contamination interne, l’aspect toxicologique ne dépend pas du détriment radiologique causé à l’organisme, ce sont deux effets nocifs distincts.

Les radionucléides absorbés présentent ces deux caractères, radiologique et toxicologique. Dans la grande majorité des cas en alpha, ils présentent tous un effet radiologique prédominant sur l’aspect toxicologique, tous, sauf un, l’Uranium 238.

 

 

En comparaison avec le plutonium Pu, l’Américium Am, le Curium Cm, et les autres isotopes de l’uranium U, l’Uranium 238 a la plus faible activité, U238 activité 1.25.104 Bq/g, l’U238 c’est l’isotope massique principal de l’uranium naturel puisqu’il lui confère 99.2% de sa masse.

En termes d’activité il est 10 000 fois moins radioactif que l’U234, et 100 000 fois moins que le Pu239 qui est le radionucléide le moins radioactif issu de la fission.

Il faut bien dissocier deux choses lorsque l’on parle de nucléaire, l’activité et la masse.

Lorsqu’il y a une activité importante, cela ne veut pas dire qu’il y a une masse de radionucléide plus importante.

Pour avoir une activité (du même ordre de grandeur) correspondant à 1 g d’U238, il ne faudra ≈ 100µg U234, ≈ 10 µg de Pu 239 et seulement 0.1 µg Am241.

Cela aide à mieux visualiser la dangerosité des poussières radioactives.

Si vous dites à quelqu’un qu’il a absorbé une poussière de 0.1µg Am241 il se fera moins de soucis que si vous lui dites qu’il a absorbé l’équivalent de 1 g d’uranium appauvri, alors qu’en terme d’activité nous sommes dans le même ordre de grandeur. C’est l’histoire du Kilo de plume et du Kilo de plomb seulement comme on parle d’un domaine que beaucoup ignorent, ils ne font pas nécessairement la distinction. C’est un argument prêtant à confusion qui est abondamment utilisé pour relativiser les risques, les fameuses microcontaminations le sont en masse, mais pas en activité.

Néanmoins la question est de savoir si effectivement le fait d’avoir incorporé 0.1 µg d’Am241 ou 1g de U238, qui d’un point de vue radiologique représente la même chose, se vérifie sur le plan toxicologique.

 

 

Alors pour bien comprendre d’où vient cette notion toxicologique, il faut regarder l’aspect expérimental qui a permis de la déterminer.

Les scientifiques ont donc réalisé, nombre d’expériences sur différents animaux, en leur injectant des doses variables de radionucléides.

De multiples prélèvements ont été effectués afin de déterminer les doses assimilables et comment celles-ci transitaient dans leur organisme.

Ces nombreuses études, ont permis de définir :

Les effets déterministes (établissant une relation de causes à effets systématiques et vérifiables sur l’organisme)

Les effets stochastiques (aléatoires)

Les doses acceptables

Les cinétiques d’éliminations

La méthodologie de suivi des mesures.

 

Bien évidemment il y a des études qui ont été réalisées sur le personnel militaire suite aux essais nucléaires, mais la grande muette porte bien son nom.

 

 

Toutes ces études ont donc permis de définir une norme limite des quantités ingérables et inhalables, afin de prévenir des risques sanitaires, pour les populations, civiles, mais aussi professionnelles.

Le choix de l’unité pour exprimer cette norme est le Sievert, l’activité règlementaire pour un travailleur du nucléaire en France est de 20 mSv par an.

 

Toutes ces études ont donc permis de définir une norme limite des quantités ingérables et inhalables, afin de prévenir des risques sanitaires, pour les populations, civiles, mais aussi professionnelles.

Le choix de l’unité pour exprimer cette norme est le Sievert, l’activité règlementaire pour un travailleur du nucléaire en France est de 20 mSv par an.

 

Dans le tableau ci-dessous, quelques valeurs en Sievert correspondant aux effets sur l’organisme humain. Suivant les institutions d’Etat émettant ce genre de données, les interprétations diffèrent, ce qu’il faut en retenir est l’ordre de grandeur pour se faire une idée.

 

Radio des poumons

0.1 mSv

Bruit de fond (radiation naturelle) annuelle

3 mSv

Radio X de l’abdomen

4 mSv

Exposition pour quelqu’un qui vie pendant un an sur le plateau du Colorado

4.5 mSv

Dose annuelle pour un mineur (mine uranium)

5-10 mSv

Scanner corps entier

10 mSv

Plus faible dose pour toutes analyses statistiques de cancer

50 mSv

Maladie due aux rayonnements légers (maux de tête, risque d’infection)

0.1-1 Sv

Empoisonnement « léger » dû aux rayonnements (Nausée fatigue, 10% de dose létale après 30 jours)

1-2 Sv

Empoisonnement sévère dû aux rayonnements (vomissement, dépilation, stérilité 35% dose létale après 30 jours))

2-3 Sv

Empoisonnement sévère dû aux rayonnements (saignement de la bouche et cutané, 50% de dose létale après 30 jours)

3-4 Sv

Empoisonnement par exposition aigue aux rayonnements (60% de dose létale après 30 jours)

4-6 Sv

Empoisonnement par exposition aigüe au rayonnement (destruction de la moelle osseuse 100% de dose létale après 14 jours)

6-10 Sv

Empoisonnement par exposition aigüe aux rayonnements (symptôme après 30 minutes, diarrhées, hémorragie interne, délirium, coma)

10-50 Sv

Coma en quelques secondes ou minutes, mort en quelques heures

50-80

Mort instantanée

> 80 Sv

 

Cette unité est quelque peu particulière, elle est la résultante d’une succession de calculs physiques permettant la conversion des Bq mesurés, en diverses unités (gramme, joule, gray, Sievert), qui permettront à terme de placer sur une échelle de valeurs l’impact biologique des rayons ionisants dans l’organisme.


Suite opus 5 partie 2 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Opus 5 partie 2  Effets radiologiques et toxicologiques  

Différence d’approche d’évaluation dosimétrique entre l’exposition externe et interne

 

Il est très important de bien distinguer les approches radiologiques, entre l’exposition externe, et l’exposition interne consécutives à une contamination, car ces approches peuvent induire en erreur, et les nombreux commentaires sur la question en témoignent.

L’exposition externe est mesurée à l’aide de dosimètre, actif (mesure en temps réel) lors des interventions et passif (film) pour le suivi mensuel.

Le dosimètre actif, lui affiche en direct une valeur en Sievert/h à laquelle est exposé le travailleur, cette valeur varie suivant la proximité ou l’éloignement de la source. Au terme de l’intervention les valeurs des dosimètres sont enregistrées, et une dose en Sievert correspondant au temps d’exposition et à la nature des rayons ionisants, est ainsi déterminée.

 

Il est bien évident, que ces dosimètres n’ont pas la capacité à pouvoir identifier de manière précise les radionucléides qui sont à la source de l’exposition, ils sont trop nombreux, ont tous des spécificités radiologiques caractéristiques, différentes. Pour les identifier et déterminer leur impact précis sur l’organisme, il faut des équipements spécifiques et très sophistiqués, ce dont dispose le laboratoire de radiotoxicologie. C’est à partir de ces données précises que le calcul de dose est effectué.

 

Pour parer à ce manque de précisions, les dosimètres appréhendent l’effet radiologique de manière différente.

 

Les plages d’énergie correspondantes à la nature du rayonnement alpha béta ou gamma sont facilement identifiables.

Le dosimètre lui va réagir en fonction de ces plages d’énergie alpha béta et gamma pour les distinguer, et attribuer à la mesure détectée en Bq différents facteurs de pondération correspondants aux rayonnements mesurés, (alpha 20, Béta, Gamma 1). Les Bq sont convertis ainsi en Gray.

Comme les dosimètres actifs mesurent l’activité corps entier, le facteur de pondération tissulaire n’entre pas en ligne de compte. La somme des différents tissus de l’organisme correspondant à un facteur de 1, donc l’activité convertie en Gray *1 correspond à l’activité en Sievert.

Concernant les alphas, en réalité, comme ils parcourent une très courte distance dans l'air, le dosimètre, ne peut les mesurer que très partiellement, à moins d'un contact direct entre la particule et le dosimètre, la géométrie et les matériaux constituant les dosimètres ne sont pas adaptées à la détection des alphas, qui pour être efficace nécessite une chambre de ionisation.

L’utilisation des facteurs de pondération est la manière utilisée pour appréhender l’effet radiologique dans les conditions opérationnelles ou l’identification précise, est impossible.

Les facteurs de pondération radiologique (Wr) sont tout simplement des facteurs qui permettent d’évaluer le détriment radiologique par son apport énergétique, mais dans une fourchette d’énergie, comprenant différents radionucléides, qui ont des activités spécifiques différentes.

L'unité est le Gray "Gy" :  1 Gy = 1 Joule/kg (d'homme).

En radiotoxicologie les données précises d’identification des radionucléides vont permettre de calculer avec précision leur impact radiologique dans l’organisme, car l'on connait l'activité précise mesurée du radionucléide.

Sa spécificité physicochimique et radiologique, ainsi que la charge corporelle de la personne impactée par la contamination.

Donc la méthodologie du calcul est différente, beaucoup plus précise dans l'approche du calcul de la dose absorbée, c'est à dire la conversion des Bq et Gray.

Il faut néanmoins considérer une autre réalité, les médecins ne sont pas spécialisés en mesures physiques, leur domaine c’est la biologie.

 

Afin d’alléger tous ces calculs, une transition a été mise en place pour faciliter le travail des médecins.

La CIPR a donc défini une méthodologie pour simplifier l’approche radiologique en définissant tout un nombre de normes qui permettent de convertir directement en dose, les activités mesurées en Bq.

 

Ce raccourci de calcul visant à simplifier l’estimation de dose, porte le doux nom de DPUI.

L’explication de la DPUI dans les formations sur le nucléaire, c’est quelque chose, je vous en ferai grâce.

C’est tout l’art et la manière de rendre inaccessible, un principe fondamentalement très simple, pour que tout le monde se sauve en courant à sa simple évocation.

 

La DPUI, Dose par Unité d’Incorporation, pour faire le plus simple possible, c’est un éventail de différents facteurs numériques, applicables à des paramètres spécifiques normalisés.

Ces paramètres spécifiques ont pour vertu de caractériser la nature, radiologique, physico-chimique du contaminant ainsi que son mode d’incorporation.

Une fois ces paramètres définis, il n’y a plus qu’à appliquer le facteur numérique correspondant à l’activité mesurée. L’activité en Bq est directement convertie en Sievert.

Tout le calcul de dose se résume au choix des paramètres et à une simple multiplication.

 

Ces facteurs de conversion sont déterminés de manière à privilégier le caractère le plus pénalisant lors d’une contamination, et dans le cas de l’U238 le caractère le plus pénalisant est toxicologique.

Le processus de conversion en Sievert en utilisant la DPUI, permet de traduire l’aspect toxicologique à partir d’une activité mesurée, cet aspect toxicologique correspond à une masse spécifique du radionucléide.

 

Si je vulgarise la situation c’est un peu comme si vous achetiez du pain (400g) à 1.3 euros que l’on assimilera aux bq, il vous en faut 2 (facteur DPUI).

Vous avez payé 1.3*2=2.6 euros vous devez donc avoir 800g de pain. L’activité (les euros) correspond à une masse.

L’exemple peut paraître stupide, tellement il est logique, cependant, dès que l’on parle de nucléaire, celui-ci devient beaucoup moins évident et pourtant nous restons dans ce même principe de calcul, il n’y a que les unités qui changent et les chiffres sont moins usuels.

 

Comme il a été dit précédemment, si vous voulez comprendre le fond des choses, ne vous attachez pas à ce que l’on vous en dit, mais à ce que l’on évite de vous dire.

Le SMP ne traite pas du cas de l’uranium appauvri.

La relation entre l’activité et la masse n’est jamais évoquée.

Les études de référence sont choisies par les personnes, qui vont définir les recommandations.

 

Suite opus 5 partie 3


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Opus 5 partie 3        Effets radiologiques et toxicologiques

 

Il serait alors bon d’ouvrir notre regard sur des études, ou données qui n’ont pas été retenues par le groupe de travail.

Il y en a une qui retient tout particulièrement l’attention, ce n’est pas véritablement une étude à proprement parler mais un fait, dont la confrontation avec les normes en vigueur pose question.

 

 

Groupe scientifique sur l’eau Institut national de santé publique du Québec

Fiche Uranium Juillet 2003

DONNÉES TOXICOLOGIQUES ET ÉPIDÉMIOLOGIQUES

Intoxication aiguë

Une insuffisance rénale aiguë ayant nécessité une dialyse, accompagnée d’anémie, de rhabdomyolyse, de myocardite, de dysfonction hépatique et d’un iléus paralytique, a été observée après l’ingestion volontaire chez l’humain de 15 g d’acétate d’uranium, soit l’équivalent de 9,2 g d’uranium. L’atteinte rénale était encore présente 6 mois après l’événement (Pavlakis et al., 1996).

 

Précision sur l’acétate d’uranium

L’acétate d’uranium UO2(CH3COO)2·2H2O  est préparé commercialement à partir d'uranium appauvri, d'où une activité spécifique résiduelle de l'ordre de 1.9 Bq/g  en vue principalement d'être utilisé en solution aqueuse alcoolisée à 1 ou 2 % pour métalliser des échantillons biologiques afin de leur donner une coloration négative, ils apparaissent plus clairs que les structures qui les entourent  en microscopie électronique en transmission (MET).

L’Uranium de ce composé se présente sous forme hexavalente  U (VI), contrairement à l’uranium contenu dans le composé UO2 qui est un composé tétravalent U (IV).

 

Calculons la dose qui correspond à cette contamination.

 

Calcul à partir des données CIPR relatives à l’Uranium 238, et de l’activité spécifique résiduelle de l’uranium appauvri présent dans l’acétate d’uranium.

Le facteur ingestion eg (DPUI) va permettre d’estimer l’activité transférée à l’organisme sur la quantité totale d’acétate d’uranium ingérée et ainsi déterminer la dose correspondante.

Plaçons-nous dans des conditions opérationnelles et considérons que sur les selles de 24 h nous ayons récupéré la totalité du contaminant, et mesuré en spectrométrie alpha une activité de 17.48 Bq, comment cela se traduirait-il par le calcul.

 

Activité de l’échantillon ingéré : 9.2 g * 1.9 Bq/g = 17.48 Bq  (mesuré en spectrométrie alpha)

(DPUI) : facteur eg mode ingestion pour un composé non spécifié « hexavalent » eg = 4.4 E-8

17.48 Bq * 4.4 E-8 = 0.8 µSv.  Cette activité est totalement négligeable. (Moins d’un millionième de Sievert)

 

Seulement il apparaît qu’après cette ingestion les conséquences auraient été, sans traitement lourd approprié, létales.

 

Abordons le calcul différemment non pas par activité mais en considérant la masse.

Il est précisé dans le tableau relatif au mode ingestion, la valeur f1= 0.020, c’est le facteur de transfert, correspondant à la forme chimique de notre uranium appauvri, c'est-à-dire le % de contaminant transféré à l’organisme par rapport au produit ingéré soit 2%. (L’activité étant reliée à la masse, 2% activité = à 2% de masse)

Donc pour une masse ingérée de 9.2g * 0.02 = 0.184 g cette fraction est transférée dans le sang comme les nutriments, le sang étant filtré au niveau du rein, (filtre environ 180 litres de sang/j), toute cette masse va donc l’affecter.

 

La valeur réglementaire CIPR pour l’uranium par g de rein est de (3 µg/g de rein), un rein pèse en moyenne 150g.

150g*2 = 300 g de rein, donc la limite règlementaire est : 3µg/g de reins * 300 g = 900 µg

 

Dans le cas présent, la contamination est de 0.184g pour une limite réglementaire de 0.000900g.

Le résultat est 204 fois supérieure à la limite règlementaire toxicologique.

 

Pourtant la DPUI est censée être représentative de l’effet le plus pénalisant sur l’organisme, il y a manifestement un gros problème.

Comment une dose potentiellement létale d’un point de vue toxicologique, peut-elle devenir insignifiante lorsqu’on applique le calcul à partir de la DPUI ?

 

Cette question a été posée à la « chargée d’état-major du service de santé d’EDF. », avec copie à la Directrice de CEIDRE qui a qualifié la question « d’anxiogène ».

Pour ce qui a été de la réaction de la « chargée d’état-major du service de santé d’EDF. » elle a convoqué le technicien qui avait posé la question dans son Bureau, s’est longtemps attardée sur la forme de la question, qui manifestement ne lui a pas plu, n’y a pas répondu, et a simplement rappelé à celui-ci qu’il ne fallait pas qu’il oublie qu’il était agent EDF.

Cette même question a été posée à un médecin, qui n’a pu y répondre.

 

Suite Opus 5 partie 4


 

 

Opus 5 partie 4     Effets radiologiques et toxicologiques

 

Il est intéressant de lire des extraits des courriers échangés entre la Chargée d’Etat-Major (CEM) et le technicien.

(En bleu quelques commentaires sur ces propos.)

 

CEM

 

Le risque alpha en CNPE provient essentiellement des cas de rupture de gaines, par ce fait les circuits se retrouvent contaminés, et les personnes intervenantes sur les opérations de maintenance risquent de se contaminer en alpha.

La surveillance dans le cadre d'une contamination par du "combustible usé" est prioritairement réalisée sur les radionucléides tels que le Plutonium, l'Américium et Curium.

Ces radionucléides servent d'alerte.

La CEM reconnaît que les ruptures de gaines sont susceptibles de provoquer une contamination à l’uranium, alors qu’elle avait soutenu le contraire à l’équipe du LAM précédemment.

S’il y a présence de ces contaminants d’alerte il y a une forte probabilité qu’il y ait aussi de l’uranium, et que cet uranium non naturel devrait venir s’ajouter au calcul de dose. (voir opus 4)

En fonction de l'activité trouvée dans les prélèvements de selles, une deuxième série de prélèvements est demandée. Si le niveau d'activité et l'enquête radioprotection le justifiaient, une recherche uranium pourrait être réalisée sur cette deuxième série de prélèvements.  La même démarche existe également pour une décision de recherche dans les prélèvements urinaires.

« En fonction de l’activité trouvée ? » Sous-entend que la recherche d’Uranium n’est prescrite qu’à partir du moment où il faut trouver une certaine quantité de contaminants d’alerte !!! Ah bon et c’est quoi l’activité de référence ???

Une deuxième série de prélèvements sera effectuée ??? Les échantillons étant aliquotés, il suffit d’effectuer l’analyse d’uranium sur la fraction restante. Demander une seconde série de prélèvements signifie, que le résultat de l’échantillon de par la contrainte technique de l’analyse ne sera pas connu au mieux avant une semaine, de plus il faut qu’une enquête radioprotection justifie cette recherche, donc le second prélèvement ne sera prélevé que deux voire trois semaines après la date de contamination. Comme par défaut le mode d’incorporation privilégié est digestif, il est à peu près sûr que rien de compromettant ne sera trouver (opus 3 cinétique d’élimination digestive), et si d’aventure il venait à y avoir un résultat gênant, le peu qui sera trouvé sera absorbé dans les incertitudes encadrant l’Uranium naturel (voir opus 4).

On peut  exclure le cas d'une contamination par du combustible neuf, du fait des spécifications de sortie d'usine du combustible neuf, en dehors d'un accident ayant mené à une rupture "disséminante"

D'autre part, vous avez raison, il ne faut pas négliger la prévalence du caractère toxique de l'uranium à son effet radiologique.

Mais le risque toxique qui est un risque rénal, n'existe que pour l'uranium sous forme "soluble" au sens de la CIPR, ce qui n'est pas le cas  dans les CNPE, où l'uranium est sous forme d'oxydes insolubles.

En conclusion : mesurer le Pu suffit en première intention, sur une contamination issue de combustible usé.

 

Technicien

 

J’ai bien entendu votre argumentaire qui justifie votre position, cependant la traque de la contamination est notre métier.

Il est vrai que notre métier au LAM consiste, si je peux m’exprimer ainsi, à couper les cheveux en quatre, et à chercher la petite bête, c’est dans notre nature sinon nous ne ferions pas ce métier.

Cela relève t’il de la déformation professionnel ? Je ne sais pas, mais j’espère que vous comprendrez que de mon point de vue, il m’apparaît nécessaire de nuancer vos propos.

Propos qui ne m’apparaissent pas faux d’un point de vue industriel, mais quelques peu convenus, témoignant d’un contenu plus adapté à une communication sécurisante pour le grand public, qu’à du personnel œuvrant au quotidien dans un laboratoire de radiotoxicologie beaucoup plus averti.

 

Que ce point ait été abordé en CE médical et que le Docteur …… ait fait une réponse identique ne me surprend pas, car en l’absence d’échange avec l’équipe technique, sur les données opérationnelles récoltées et du partage de différentes visions conditionnés par nos activités complémentaires, je ne vois pas comment le service médical pourrait statuer d’une autre manière

 

Certes, mais il ne faut pas oublier de dire que le rechargement du combustible s’effectue par tiers, et que, par défaut, et ce de manière permanente, les deux autres tiers sont directement impactés par le risque potentiel de ruptures disséminantes accidentelles où par une usure prématurée due à la corrosion des gaines.

 

Concernant l’étude de la fiche uranium de juillet 2003, que je vous ai exposé, émanent du Groupe Scientifique sur l’eau de l’Institut national de santé publique du Québec.

Vous argumentez que le risque toxique qui est un risque rénal n’existe que pour la forme soluble au sens de la CIPR, ce qui n’est pas le cas dans les CNPE, où l’uranium est sous forme d’oxydes insolubles.

Cela semble être en soit un élément suffisant pour justifier la suppression de l’analyse Uranium comme recherche de contaminant en première intention.

La recherche de l’uranium comme contaminant était jusqu’à présent une recherche effectuée de manière systématique sur tous les échantillons quel qu’en soit leur nature.

Le mode transitoire de chimie séparative a été mis en place uniquement pour permettre à laboratoire de traverser une période de crise sans précédent en 2013, et ce pour de nombreuses raisons.

Je ne comprends pas la décision de vouloir supprimer cette analyse, et de faire du mode transitoire le mode officiel de fonctionnement.

Je fais simplement un constat, depuis que j’ai évoqué le fait, que les analyses d’uranium étaient réalisés sur les eaux de réseau, et qu’il serait judicieux de se poser la question de la cohérence de nos résultats par rapport aux normes OMS relative à l’eau, l’analyse de l’uranium sur les travailleurs devient facultative et non plus systématique.

Une fois de plus je ne vais pas établir de relation de cause à effet, mais je trouve cette coïncidence surprenante.

L’argument des eaux de boisson riches en uranium est très largement utilisé pour justifier les écarts isotopiques de l’uranium naturel trouvé dans les échantillons. Mais les nouvelles dispositions sur la surveillance des eaux de boisson et de réseau mettent un frein à l’utilisation abusive de ce type d’argument et invitent à se poser d’autres questions, et manifestement celles-ci semblent être dérangeantes.

 

Concernant l’insolubilité

D’autre part il ne faut pas négliger que le terme d’insolubilité de l’UO2, s’applique à pH neutre.

Lors de leur passage dans l’estomac les oxydes d’uranium dans le chyme sont en milieu très acide, les sucs gastriques (pH 1 ne sont ni plus ni moins que de l’acide chlorhydrique) ceux-ci contribue à leur solubilité même si celle-ci reste très faible.

Soluble les uranyles n’existent pas sous forme libre et ont une grande réactivité avec les oxyanions, bicarbonates HCO3-, carboxylate RCOO-, Phosphoryles PO32-, ainsi associés leur absorption s’effectue avec les nutriments ultérieurement, au moment du passage du Chyme devenu Chyle au niveau de l’intestin grêle (jéjunum) après neutralisation du pH acide par la bile et les sucs pancréatiques.

Effectivement à pH neutre les oxydes d’uranium sont insolubles, mais il ne faut pas oublier ce qui ce passe en amont.

Attention à cette très faible transférabilité dont la relative insignifiance me pose question.

L’argument d’insolubilité de l’uranium industriel est réduit à néant, l’étape en amont de la réintroduction dans l’organisme des nutriments place l’uranium en milieu fortement acide, il change de forme physico-chimique. Cette transformation lui confère alors une potentialité d’association avec les nutriments, ceux-ci intègrent la forme modifiée de l’uranium à leur structure moléculaire qui est absorbée ensuite dans l’organisme. La justification de cette impossibilité chimique par l’argument du pH, est un abus de langage médico-industriel à vocation de « Com » qui relève du mensonge.

 

Personnellement je pense que les valeurs que j’évoquais dans mon mail ne relève aucunement de présence d’Uranium naturel mais que nous sommes devant de véritables contaminations, et que les mesures de calcul visant à dissocier par une valeur de référence l’uranium naturel de l’artificiel s’impose.

Par l’incohérence de la DPUI du mode ingestion, conduisant à des doses insignifiantes, beaucoup de cas de contamination réelle sont ignorées, et l’application décrite dans le SMP visant à dissocier l’Uranium naturel des contaminants n’est pour ainsi dire jamais appliquée, chacun y allant de sa propre interprétation.

Il serait grand temps qu’une véritable étude mette les choses au clair et que les valeurs d’alerte soient clairement définies.

Pour nous techniciens cette information est importante, elle l’est d’autant plus pour le patient.

La réalité est que l’Uranium est le risque majeur sur les CNPE, pourtant c’est celui qui est le plus minoré, et cette étude démontre que la CIPR donne une porte de sortie pour rendre transparent ce fait.

Il le sera d’autant plus si cette analyse est supprimée.

 

 

Pour rappel la DPUI ingestion pour U238 équivalente à la limite règlementaire annuelle de 20 mSv de dose engagée correspond à une masse de 33.8 g.

Cela est 3.7 fois plus que cette donnée toxicologique.

Qu'est ce qui prévaut dans notre cas :

S'assurer de la bonne santé de nos agents en priorisant le risque toxique de l'uranium, ou fermer les yeux en se justifiant par la stricte application de la CIPR, qui ne tient compte que de l'aspect radiologique et minimise le risque.

Cette seconde approche permet d'occulter la responsabilité de notre entreprise, mais d'un point de vue éthique, est ce que cela est défendable au sein d'un laboratoire d'analyses médicales.

Le technicien semble attribuer l’incohérence de résultat à une coquille émanent de la CIPR, mais n’y aurait-il pas autre chose qui pourrait expliquer ce fait ?

 

 

Constat

 

Au travers des propos, il apparaît clairement que l’uranium pose un gros problème, et les arguments développés par la CME sont d’un point de vue de l’éthique médicale difficilement recevables.

La CME ne fournira pas de réponse écrite sur la question de la DPUI, pas plus qu’elle n’en fournira pendant l’entretien qui s’ensuivra à cette réponse.

Une chose est sûre, la question gêne vraiment.

Il apparaît deux faits qui posent question

 

a) Pourquoi la donnée sur la contamination a été exclue des études du SMP de 2011, alors qu’elle est relativement récente 1996 et traite d’un cas humain, rare, sur lequel les données sont très précises, et ce émanant d’un organisme reconnu ?

Argumenter d’un défaut de la définition des niveaux de preuves du SMP, pour écarter pareil cas, ça serait comme émettre un doute sur le résultat de quelqu’un qui se met un revolver sur la tempe et qui se tire une balle.

En pareille circonstance, soutenir qu’il n’y a pas de relation de cause à effet, juste parce que c’est le seul cas connu, et sous- entendre qu’il est tout à fait possible d’envisager une autre issue, relèverait d’un absurde manque de bon sens.

 

b) Pourquoi le cas de l’uranium appauvri n’est jamais évoqué, pas plus que son effet toxicologique relatif à sa masse ?

 

Le fait d’évoquer ce cas particulier met en évidence une chose, il y a une incohérence entre le calcul par la DPUI et la donnée CIPR massique pour l’U238, cela est d’autant plus marqué, dans ce cas extrême où la masse de contaminant est très importante.

Ne serait-ce après tout, seulement ce côté trop voyant, que tout le monde cherche à éviter.

Effectivement, la particularité de ce cas attire l’attention, 20 mSv de dose engagée, correspond à une masse de 33.8 g d’U238.

Même si vous ne connaissez pas le domaine du nucléaire, si je vous dis qu’en ingérant 33.8 g d’Uranium appauvri, vous ne risquez rien. Avec deux sous de bon sens, vous allez vite avoir de très gros doutes et vous aurez bien raison, 33.8 g c’est vraiment beaucoup.

 

La CIPR ce n’est pas un organisme qui laisse facilement place à une coquille dans ses ouvrages, et vu que celle-ci donne les deux valeurs, un radiologique (DPUI) et une biologique (masse par g de rein), il y a fort à parier que ces valeurs ont été corrélées. Néanmoins cela est fort curieux que deux unités différentes soient données par la CIPR, vu que la DPUI est censé corrélé l’aspect radiologique à l’aspect toxicologique.

Corrélées certainement, mais néanmoins il apparaît un détail surprenant, l’expression de l’unité choisie pour estimer ce risque toxicologique, 3µg/g de rein est tout de même surprenante, en biologie devant un risque toxique la norme usuelle définit le risque par : Masse (g, mg, µg) de produit toxique / Volume de sang (L, dm3, Cm3).

Ce choix est tout à fait surprenant, il apparaît comme une difficulté supplémentaire à pouvoir comparer au premier coup d’œil, une norme concernant un contaminant (radioactif), à d’autres contaminants toxiques plus courants et bien connus.

Il y a là, une formulation quelque peu contradictoire, avec le principe de fond, qui établit une relation entre l’activité et la masse. Cette ambigüité de présentation semble être tout à fait intentionnelle, mais quel est en est le sens profond ?

 

Alors la question est, si la CIPR donne des valeurs justes, qu’est-ce qui induit un tel écart de résultat ?

Au regard des méthodes utilisées jusqu’à présent, dont le monde de l’atome use et abuse, pour s’exempter de toutes formes de responsabilités, il serait plus prudent de se poser la question sous cette forme.

Qu’est-ce que la CIPR ne dit pas, et qui laisse, sous forme d’une imprécision subtile, une porte ouverte à une libre interprétation de la  méthodologie de l’approche du calcul de dose.

 

Si c’est le cas, cela veut dire que notre problème n’est pas spécifique à l’uranium appauvri, mais qu’il s’étend à tous les radionucléides.

En effet pour tous les autres radionucléides alpha, rien n’invite à se poser cette question de manière aussi évidente, les masses sont beaucoup trop petites et totalement insignifiantes pour le commun des mortels.

 

Le cas spécifique de l’uranium appauvri, deviendrait alors le radionucléide à éviter à tout prix, car trop voyant, il invite à se poser la question de l’incohérence des résultats, et une fois que cette question est posée ……

 

Ceci explique peut-être cela.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article